Modifications de la Loi de santé neuchâteloise

Rapport au nom du Groupe socialiste concernant la Loi de santé

 

La santé est un domaine en constante évolution. Il suffit pour s’en convaincre de voir le nombre de publications que l’on reçoit. Les innovations techniques se succèdent à un rythme considérable et modifient les conditions des traitements.

 

Les mentalités évoluent également. Les rapports entre les médecins et leurs patients se sont beaucoup modifiés. Le patient comprend mieux le domaine médical aujourd’hui. Il s’observe lui-même avec exactitude. Il dispose d’une très large documentation médicale, accessible en librairie ou sur la toile. Il ose un diagnostic. Il arrive au cabinet médical avec une pile volumineuse de publications sur le mal dont il pense souffrir et un avis parfois déjà tranché sur le traitement qu’il doit suivre. Il se méfie de l’erreur médicale, il ne veut pas prendre n’importe quel médicament. Ce patient-là déteste qu’on l’infantilise, qu’on lui cache la vérité sur son état. Il veut savoir, comprendre, participer à sa guérison. Pour lui, le médecin n’est plus un demi-dieu ou un bienfaiteur paternel. C’est un conseiller, avec lequel on collabore pour guérir. Il veut une relation de confiance, d’adulte à adulte. Et quand le moment est venu de s’en aller, il veut pouvoir partir sereinement, sans souffrir d’acharnement. Il veut choisir jusqu’à quand il supportera un traitement pénible, sans espoir de guérison.

 

Les dispositions légales doivent tenir compte de ce changement de mentalité et s’adapter à la volonté de ce nouveau patient exigeant envers son système de santé, mais qui cherche aussi à ne pas en abuser et à éviter l’acharnement.

 

C’est également un changement important des mentalités qui permet de reconnaître aujourd’hui le droit des femmes de disposer d’elles-mêmes et de mettre au monde des enfants réellement désirés, dont elles peuvent s’occuper avec attention.

 

Enfin, les échanges internationaux augmentent régulièrement et nous obligent aussi à adapter notre législation à la nouvelle donne.

 

Les accords bilatéraux, permettent une plus grande mobilité de la main-d’œuvre en Europe. Cela est aussi valable pour les professions de la santé. C’est donc un  nouveau régime de reconnaissance de diplômes européens qui est mis en place.

 

Le projet de Loi cantonale de santé que le Conseil d’Etat propose à notre approbation est une adaptation du droit cantonal aux nouvelles dispositions fédérales, qui ont été adoptées ces dernières années. Ce n’est pas une révolution. On introduit simplement les accords bilatéraux, la LF sur les produits thérapeutiques, la révision du CP, art. 119 sur l’interruption de grossesse et la protection des patients hospitalisés en milieu psychiatrique.

 

Le Conseil de santé a approuvé ce texte à l’unanimité.

 

Le groupe socialiste acceptera ce projet qui tient largement compte du droit et de la protection du patient, reconnaît les diplômes européens conformément aux accords bilatéraux.

 

Il est vrai que la santé bouge à une telle vitesse, que d’autres dispositions pourraient encore être modifiées actuellement. Cependant, cela n’a pas de sens d’attendre qu’il y ait plus de nouveautés pour adapter le droit cantonal, car il y en aura toujours. Il faut bien procéder par petites étapes. Cette loi n’est certes pas définitivement révisée. Elle doit continuer à être adaptée régulièrement.

 

Les dispositions qu’elle contient sont suffisamment importantes pour ne pas être repoussées à plus tard. Pensons en particulier à l’information du patient, à l’interruption de grossesse ou aux bilatérales. Il faut que nous ayons ces bases légales pour agir.

 

Le groupe socialiste salue la réorganisation du service de la santé, qui clarifie les attributions de chacun et permettra d’augmenter considérablement son efficacité.

 

Il apprécie l’expression du droit du patient « d’être informé de manière claire et appropriée ». Il considère que la possibilité de rédiger des directives anticipées et de désigner un représentant thérapeutique va dans le sens d’une meilleure prise en compte de la volonté du patient. Cela permettra probablement aussi d’éviter certains cas d’acharnement thérapeutique. En effet, en l’absence de la décision clairement exprimée du patient, le médecin tient à faire tout ce qui est en son pouvoir pour tenter de sauver son patient, même si l’espoir d’y arriver est plus que faible. Le patient peut ainsi fixer les limites de ce qu’il accepte à l’avance. Et ce qui est très important aussi, la loi prévoit les garde-fous nécessaires : le recours à l’autorité tutélaire s’il y a conflit flagrant entre le bien du patient et la décision exprimée. C’est évidemment très important pour éviter tout dérapage.

 

Nous relevons aussi favorablement le respect des personnes atteintes d’affections mentales, d’alcoolisme et de toxicomanie. Ces personnes se trouvent toujours dans des situations particulièrement difficiles. Elles ne supportent que mal la contrainte et en souffrent extrêmement. La définition très restrictive des cas où l’on peut appliquer un traitement ou procéder à un placement contre la volonté de la personne est conforme à ce que l’on peut attendre. Elle respecte au maximum la volonté et la liberté de la personne, tout en protégeant sa santé. Une personne ne sera contrainte qu’en dernier recours, en cas de danger ou d’urgence seulement, et en respectant le principe de la proportionnalité. La nécessité de maintenir la contrainte sera réévaluée régulièrement et la commission cantonale de contrôle psychiatrique peut être appelée à examiner la levée du traitement, si les proches du patient le demandent.

 

Cette commission est donc destinée à jouer un rôle très important. Elle doit décider de la liberté de personnes en difficultés, mais qui n’ont commis aucun délit, qui peuvent cependant être dangereuses pour elles-mêmes, voire éventuellement pour les autres. Nous insistons pour que cette commission soit choisie avec soin. Il faut qu’elle soit suffisamment peu nombreuse pour être efficace et pour que chacun de ses membres se sente pleinement responsable et suffisamment nombreuse pour qu’il y ait un équilibre entre ses membres, une certaine neutralité, issue de la confrontation de points de vue différents. Quatre à cinq membres paraît être une bonne solution. Il serait préférable qu’elle soit composée de personnes qui ne travaillent pas dans les institutions dans lesquelles les patients peuvent être placés, de manière à garantir son indépendance.

 

Le rythme du réexamen devrait être fixé, pour éviter que certaines personnes ne soient oubliées pendant des mois, sans que leur cas ne soit réévalué.

 

Le groupe relève avec satisfaction la reconnaissance des soins de réadaptation et des soins palliatifs, cités aux articles 97 et 98, qui sont deux domaines médicaux importants pour la réintégration sociale des personnes en difficultés, pour les uns, et pour permettre aux personnes atteintes de maladies incurables de vivre avec le plus de confort possible, pour les autres. Nous nous étonnons seulement que les soins de transition psychiatriques, qui sont cités à l’article 97 d, ne soient pas repris comme les autres à l’article 98 c. Nous voulons croire qu’il s’agit d’un oubli qui doit être corrigé.

 

Quant à la délivrance d’autorisations pour les familles d’accueil, cela va de soi quand on prône le respect des personnes âgées. Les personnes âgées n’ont souvent plus l’énergie de se défendre en cas de maltraitance ou de qualité insuffisante du service. Il est important que cela puisse être contrôlé et une autorisation éventuellement retirée, en cas d’abus manifeste.

 

En ce qui concerne les produits thérapeutiques, le souci de protection du patient va dans le bon sens. Le fait que la vente de médicaments reste l’apanage du pharmacien nous paraît positif. Le pharmacien reste ainsi l’interlocuteur privilégié du patient en ce qui concerne les médicaments. N’autoriser que les personnes au bénéfice de titres suffisants à exploiter une pharmacie ou une droguerie garantit que celui qui vend des médicaments a la compétence nécessaire pour conseiller aussi le client. Le contrôle de la fabrication de médicaments par le pharmacien correspond aussi à une volonté de garantir la qualité des produits.

 

L’interdiction de principe de la vente par correspondance et les règles strictes auxquelles sont soumises les exceptions répond au même souci de protection du patient. Cela permet d’éviter une automédication sans contrôle aucun, qui pourrait mettre la santé des patients en danger.

 

L’interdiction de la propharmacie est une mesure évidente quand on a le souci des coûts de la santé. Il est indispensable que la personne qui prescrit le médicament ne soit pas la même que celle qui le vend.

 

 

Postulat

 

Le groupe socialiste ne soutiendra pas ce postulat, même s’il lui reconnaît des qualités, et de l’intérêt, en particulier en ce qui concerne la mission du Conseil de santé et l’implication des forces politiques dans le domaine de la santé.

 

La loi sur la santé doit être révisée régulièrement. Le domaine de la santé est en effet en continuelle évolution et des adaptations doivent se faire régulièrement. Plusieurs d’entre nous l’ont souligné hier. Cette loi continuera donc de faire l’objet de réflexions et de modifications partielles.

 

Est-il utile d’envisager une refonte complète ? En l’état actuel des choses, il me semble que non. Des révisions régulières peuvent amener la souplesse nécessaire, les adaptations au droit suisse et européen qui sont utiles et les améliorations d’organisation qui nous paraissent nécessaires. Certains problèmes qui ont été évoqués hier pourront sans doute être résolus de cette manière.

 

Il serait d’ailleurs illusoire de penser qu’une refonte complète pourrait nous éviter des modifications partielles ultérieures.

 

Renforcer le rôle du Conseil de santé ? Oui. Si nous sommes favorables à une démocratie participative, nous sommes certainement aussi favorables à une discussion plus large et plus continue avec le Conseil de santé. Même s’il n’est pas réuni très souvent, il me semble qu’il joue son rôle d’organe de consultation. Il apporte un éclairage technique intéressant puisque plusieurs professionnels de la santé y participent.

 

Renforcer la représentation des forces politiques du législatif à l’intérieur du Conseil de santé ? Oui aussi. Et nous aimerions encourager le Conseil d’Etat à étendre éventuellement le Conseil de santé en y adjoignant davantage de représentants des partis, ou à  remplacer peu à peu les membres démissionnaires par des personnes plus impliquées politiquement. Le Conseil de santé n’en jouera que mieux son rôle de relais entre les milieux de la santé et les milieux politiques, le Grand Conseil en particulier.

 

Enfin, nous voyons un problème réel dans le délai de mise en vigueur. Nous regretterions en effet de devoir reporter la mise en vigueur d’une loi que nous avons votée et dont nous avons besoin rapidement pour pouvoir le faire en même temps que les propositions de ce postulat. Et je pense qu’il n’est pas non plus nécessaire de forcer le rythme des changements au sein du Conseil de santé pour les mettre en vigueur plus rapidement.

 

 

 

 

 

 

tabs-top

Comments are closed.